RUBRIQUES DE CE NUMÉRO
SPÉCIAL NOMINATION RECTEUR*
1. Un processus de nomination avec des candidatures cachées
Pour la plupart des membres de la communauté universitaire, le rectorat est une entité abstraite et fort éloignée de leur vie quotidienne. Tout au plus voient-ils à l’occasion la figure du recteur à un événement ou reçoivent-ils ses déclarations ou vœux de fin d’année.
Pourtant le personnage est le premier officier de l’université. De lui relève la structure administrative de l’institution. En lui repose la défense de la fonction prioritairement scientifique de l’institution universitaire. Par lui s’effectue l’interface avec la société et les pouvoirs publics. Son mode de sélection révèle l’identité et la personnalité d’une université.
Tous les 5 ou 10 ans, la nomination d’un nouveau recteur est une rare occasion pour la communauté universitaire de l’UdeM de se rapprocher du rectorat, de regarder de près les candidats et leurs programmes, et de réfléchir à la situation de l’université. Cela se fait dans le cadre d’une participation authentique à la nomination du recteur. Le processus est ouvert et public.
De 1967 à 2018 : un processus ouvert et participatif
Cette implication significative de la communauté universitaire, y compris dans la nomination du recteur, est un des acquis de la période de la Révolution tranquille marquée par l’adoption de la Charte de 1967. Auparavant la communauté universitaire était absente du processus de nomination du recteur. C’est l’Église catholique qui le nommait et les quatre premiers recteurs étaient des « monseigneurs ». Le processus était secret.
De la période 1920-1967 à la période post-1967, l’UdeM a été sur une trajectoire d’ouverture, de collégialité, de participation et de transparence. Le 14 mai 2018, durant l’exercice de modification des Statuts, l’Assemblée universitaire, représentante de l’ensemble de la communauté universitaire, a confirmé cette trajectoire, entre autres, pour la nomination du recteur : 1) liste publique des candidats, 2) c.v. et programmes fournis à la communauté, 3) participation à un exposé public des programmes avec période de questions pour la communauté, 4) scrutin indicatif à l’Assemblée universitaire.
En 2019 : retour au secret
Or, le 28 août 2018, le Conseil de l’université, instance de 23 membres, en majorité cooptés et externes à la communauté universitaire, a renversé la décision de l’Assemblée universitaire et décrété un processus fermé : 1) la liste publiée des candidats serait incomplète parce qu’elle ne contiendrait pas les candidatures cachées, 2) la communauté universitaire ne connaîtrait ni les c.v. ni les programmes des candidats, 3) il n’y aurait plus de présentation publique des candidats et des programmes, 4) l’Assemblée universitaire perdrait son droit de vote sur les candidatures, et 5) le Conseil pourrait nommer recteur une candidature dissimulée à la communauté universitaire.
À larges majorités, l’Assemblée universitaire a voté une résolution de désaccord avec cette action du Conseil le 10 septembre 2018 et une résolution demandant au Conseil de reconsidérer le 15 octobre 2018. De nombreuses unités et organisations ont appuyé la position de l’Assemblée universitaire (Rubrique 2). Pour sa part, le chancelier de l’université et président du Conseil a refusé de rencontrer le CEPTI et l’Assemblée universitaire pour discuter de ce qu’avait fait le Conseil et chercher une solution.
Constats et inquiétudes
- Les dispositions introduites par le Conseil sont antithétiques à l’esprit et aux usages du monde universitaire.
- À la collégialité, la transparence et la procédure commune sont substitués le « top down », l’opacité et la procédure de faveur.
- Le Conseil ramène l’UdeM à son passé pré-1967, alors que la « transformation institutionnelle » de 2016 était censée la projeter vers l’avenir.
- Les volontés d’une minorité (membres du Conseil) sont imposées à la majorité (la communauté universitaire).
- Le Conseil élargit unilatéralement ses pouvoirs aux dépens de la communauté universitaire et de sa représentante, l’Assemblée universitaire. Il monopolise la nomination du recteur et réduit la communauté universitaire à faire de la figuration.
- La procédure confidentielle conduit à la nomination d’un recteur du Conseil, non d’un recteur de l’université. Le rectorat n’en serait que plus rattaché au Conseil et plus éloigné de la communauté universitaire.
- Les candidats secrets bénéficient d’un passe-droit parce qu’ils ne subissent pas de concours public. Les candidats qui se prêtent au concours public peuvent se voir doublés par un candidat dissimulé qui s’en exempte.
- Les candidats qui font connaître leur candidature, leur c.v. et leur programme seront ceux qui respectent la communauté universitaire.
- Le Conseil affaiblit la légitimité et la crédibilité du recteur si sa candidature a été secrète. Choisi sans concours public, il aura accédé au rectorat en jouissant du privilège de se dérober à la communauté qu’il veut diriger. Son mandat est compromis et discrédité dès le départ.
- Ainsi fragilisé, un tel recteur est l’obligé et le prolongement du Conseil auquel il doit tout.
- Comme le Conseil représente majoritairement des visions, des logiques et des pratiques non universitaires, l’une des conséquences de la procédure secrète est d’augmenter les risques qui pèsent sur la mission universitaire d’enseignement et de recherche. Dans le rapport du comité de consultation, on note que le profil recherché du futur recteur comprend … « le courage managérial ».
Documentation
1. Numéros antérieurs d’Enjeux universitaires – Des profs vous informent :
https://enjeux-universitaires.ca/NV/numeros/2018-19/no-67-16-octobre-2018/
https://enjeux-universitaires.ca/NV/numeros/2018-19/no-68-6-novembre-2018/
https://enjeux-universitaires.ca/NV/numeros/2018-19/no-70-22-janvier-2019/
https://enjeux-universitaires.ca/NV/numeros/2018-19/no-72-19-mars-2019/
https://enjeux-universitaires.ca/NV/numeros/2018-19/no-73-16-avril-2019/
https://enjeux-universitaires.ca/NV/numeros/2018-19/no-74-13-mai-2019/
https://enjeux-universitaires.ca/NV/no-75-17-septembre-2019/
2. Lettre annexée au procès-verbal du 5 juin 2019 de l’Assemblée universitaire
* Évidemment « recteur » et « candidat » sont épicènes. La forme courte évite lourdeurs et répétitions.
2. Unités académiques, associations et syndicats qui appuient la décision de l’Assemblée universitaire en faveur d’un processus ouvert, collégial et participatif de nomination du recteur
1. Unités académiques
Département d’anthropologie
Département de bibliothéconomie et des sciences de l’information
Département de communication
Département de démographie
Département de didactique
Département de géographie
Département d’histoire
Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques
Département de linguistique et de traduction
Département de littératures et de langues du monde
Département de mathématiques et de statistique
Département de pathologie et microbiologie
Département de philosophie
Département de physique
Département de psychologie
Département de psychopédagogie et d’andragogie
Département de santé environnementale et santé au travail
Département de sciences biologiques
Département de sciences économiques
Département de sociologie
Département des littératures de langue française
Département d’informatique et de recherche opérationnelle
École de criminologie
École de psychoéducation
École de relations industrielles
École de travail social
Faculté de pharmacie
Institut d’études religieuses
2. Syndicats et associations
AGÉÉFEP : Association générale des étudiants et étudiantes de la Faculté de l’éducation permanente de l’UdeM
FAÉCUM : Fédération des associations étudiantes du campus de l’UdeM
SEEUM-1186 : Syndicat des employés d’entretien de l’UdeM
SERUM : Syndicat des employé.e.s de la recherche de l’UdeM
SÉSUM : Syndicat des étudiant(e)s salarié(e)s de l’UdeM
SEUM-1244 : Syndicat des employé.e.s de l’UdeM
SGPUM : Syndicat général des professeurs et professeures de l’UdeM
3. Recteurs de l’UdeM
1920 - 1923 Mgr Georges Gauthier
1923 - 1934 Mgr André-Vincent-Joseph Piette
1934 - 1955 Mgr Olivier Maurault
1955 - 1965 Mgr Irénée Lussier
1965 - 1975 Roger Gaudry
1975 - 1985 Paul Lacoste
1985 - 1993 Gilles G. Cloutier
1993 - 1998 René Simard
1998 - 2005 Robert Lacroix
2005 - 2010 Luc Vinet
2010 - 2020 Guy Breton
4. Un processus autrefois transparent
Des pages du journal Forum illustrent le processus ouvert, collégial et participatif qui a eu cours à l’UdeM depuis qu’elle a été laïcisée durant la Révolution tranquille et auquel le Conseil de l’université a mis fin en 2018.
2009
calendrier (annotations importantes à la page 3)
2004
calendrier (annotations importantes à la page 2)
1997
1992
1984
1974
des professeurs font le procès de la procédure
(Remerciements à madame Céline Widmer, archiviste à la Division de la gestion de documents et des archives, Secrétariat général)
5. Rapport du comité de consultation sur le profil recherché
6. À l'Assemblée universitaire : campus MIL, comités d’éthique de la recherche, École de santé publique
Faits saillants de la séance du 9 septembre 2019 (surlignés dans le procès-verbal) : procès-verbal du 9 septembre 2009
· page 10 : campus MIL
· page 11 : comités d’éthique de la recherche
· pages 11-19 : École de santé publique
Deux changements mineurs ont été apportés au procès-verbal lors de la séance du 7 octobre de l’Assemblée universitaire.